Entrepreneuriat : à quelles conditions crée-t-on de la valeur ?

Publiée le 30/04/2025

Plus d’1,1 million d’entreprises ont été créées en 2024, confirmant la dynamique entrepreneuriale observée ces dernières années en France. Si nous pouvons nous réjouir que la bataille culturelle pour la démocratisation de l’entrepreneuriat soit en passe d’être gagnée, ce nombre doit être regardé avec vigilance : la pérennité et la viabilité de ces entreprises (qui sont à 64 % des micro-entreprises) ne sont pas garanties.

L’importance d’une approche qualitative

Si la simplification administrative a facilité et donc participé à encourager la création d’entreprises, elle ne constitue en rien un gage de réussite. Trop d’entrepreneur·e·s se lancent sans réelle stratégie, sans positionnement clair et sans modèle économique viable. Or, la pérennisation d’une activité entrepreneuriale repose sur plusieurs facteurs interdépendants : une vision stratégique bien définie, une capacité d’adaptation aux évolutions du marché et l’acquisition de compétences essentielles à la gestion d’une entreprise.

Pour assurer un entrepreneuriat créateur de valeur – à la fois pour les entreprises et pour la société – il est essentiel de ne pas se cantonner à une approche quantitative qui prendrait pour mesure centrale le taux de création, mais bien de suivre les trajectoires des entrepreneur·e·s et d’analyser d’autres indicateurs pertinents :

  • L’évolution du chiffre d’affaires,
  • La stabilité des revenus des entrepreneur·e·s,
  • La capacité des entreprises à assoir leur modèle économique et à croître au-delà des premières années d’activité (il faut en moyenne deux ans pour assoir un modèle économique viable et quatre ans pour le voir décoller).

Face à la part toujours plus importante de nouvelles entreprises individuelles, nous devons aussi nous interroger : comment remettre du collectif dans des logiques individuelles de création de son propre emploi ?

La France, un pays d’entrepreneur·e·s ou de non-salariés ?

Les créations d’entreprises sont aujourd’hui largement motivées par une quête d’indépendance. Dans le cadre du premier volet de notre étude Qui sont les entrepreneur·e·s d’aujourd’hui ?, 66% des personnes interrogées déclaraient qu’être indépendant faisait partie de leurs trois principales motivations pour créer leur entreprise.

Assiste-t-on, au-delà d’une envie entrepreneuriale, à un rejet du salariat ? Cette distinction est cruciale, car une aspiration à l’indépendance ne constitue pas, en soi, un projet économique. Une telle approche de l’entrepreneuriat produit aussi des conséquences sur le tissu économique, car ces entrepreneur·e·s n’ont pour certains pas de fortes ambitions de croissance et surtout de création d’emplois.

Il est donc essentiel à la fois de muscler les ambitions entrepreneuriales, pour favoriser le développement de TPE et de PME sur les territoires, et d’encourager les collaborations entre entrepreneur·e·s, même individuels : mutualiser les ressources, mettre en place des partenariats, créer des collectifs, mettre en réseau, etc.

Les compétences, levier de développement des entreprises

Diriger une entreprise ne se limite pas à maîtriser un savoir-faire métier ; il faut également développer des compétences transversales en gestion, financement, stratégie commerciale, etc. Pourtant, dans la pratique, 85 %1 des travailleurs non-salariés (TNS) ne se forment pas.

S’il existe aujourd’hui de nombreux dispositifs pour accompagner l’entrepreneur·e dans la création de son entreprise, il faut dire qu’ils sont beaucoup moins nombreux pour l’appuyer dans son développement. Or, la difficulté pour les entrepreneur·e·s n’est pas tant de créer que de faire perdurer leur activité : si 64 % des personnes interrogées dans le cadre de notre étude déclarent que créer une entreprise est simple, la même proportion admet que faire perdurer leur activité est difficile. C’est d’ailleurs la question de la stratégie commerciale qui pose le plus de difficultés aux chefs d’entreprise.

En ne se formant pas, ces derniers limitent leur capacité à s’adapter, à faire évoluer leur offre, leur réseau de distribution ou encore leur communication. Pour aider les entreprises à développer leur potentiel, nous devons donc nous engager collectivement :

  • Investir dans les compétences entrepreneuriales ;
  • Questionner les modèles économiques et les trajectoires de croissance ;
  • Les aider à muscler leurs stratégies commerciales ;
  • Les financer au bon niveau.

1 Formation professionnelle des travailleurs indépendants, état des lieux et propositions – BGE

Allouer au mieux les ressources

Pour être utiles aux entrepreneur·e·s tout en affectant au mieux la ressource publique dédiée à l’entrepreneuriat, nous travaillons chez BGE à des stratégies d’accompagnement adaptées au profil des entrepreneur·e·s. Nous avons ainsi, dans le cadre de notre étude, travaillé à identifier sept familles d’entrepreneur·e·s.

  • Au niveau individuel, cette approche nous permet de toujours mieux diagnostiquer et positionner la personne à l’entrée pour lui proposer un parcours adapté à ses besoins (en termes d’intensité, de durée, de modalités, etc.) ;
  • Au niveau collectif, cette adaptation des interventions doit permettre la plus juste et efficiente utilisation des fonds publics, en s’assurant que les parcours soient calibrés de la manière la plus précise possible, au regard des besoins de la personne.

En savoir plus sur la segmentation

Parmi les travailleurs indépendants allocataires du RSA qui intègrent chez nous un parcours intensif d’appui au développement de l’activité, 70 % sortent durablement du RSA. Ce parcours, financé à hauteur de 510 000 euros par le Département des Alpes Maritimes, permet donc, à horizon de 12 mois, de réaliser une économie d’allocations de 5 millions d’euros pour la collectivité.

Cela est rendu possible par le diagnostic de compétences entrepreneuriales qui est réalisé avec le chef d’entreprise : analyse 360 de la personne et de son entreprise, des freins et des leviers de développement de l’activité indépendante afin de la rendre rémunératrice. A l’issue de ce diagnostic partagé, l’entrepreneur·e est intégré dans un parcours intensif de développement d’activité ou réorienté vers un autre référent qui l’accompagnera efficacement dans une recherche d’emploi salarié complémentaire. C’est ainsi que les acteurs du Plan Départemental d’Insertion peuvent se prévaloir de tels résultats, et assurent la bonne utilisation des ressources financières de la collectivité dont nous faisons usage.